Dans le cadre de l'opération Relançons le débat économique du cercle des économistes, j'ai rédigé une note, intitulée Croissance durable ou décroissance?, dans laquelle je pose les termes du débat entre ces deux voies de sortie du modèle de développement insoutenable actuel.

Mon propos n’est pas de relativiser, d’une manière ou d’une autre, l’urgence environnementale. Il y a urgence à prendre des mesures drastiques qui s’imposent pour limiter le réchauffement climatique. Il y a urgence à réduire nos émissions polluantes pour préserver la santé humaine et l’écosystème de la planète. Il y a urgence à préserver la biodiversité pour protéger le vivant. Il y a urgence à gérer de manière durable les quantités et la qualité des ressources naturelles, comme l’eau. Les constats sur l’état de l’environnement et les objectifs à atteindre sont aujourd’hui largement partagés ; les climatosceptiques sont une espèce en voie d’extinction sous la pression des faits accumulés par le GIEC. Ce qui est en débat, et que j'analyse dans cette note, c’est la trajectoire du nouveau chemin que doivent emprunter nos économies et sociétés. Vers quelle voie devons- nous nous orienter collectivement pour nous éloigner de ce modèle de développement insoutenable ? Le moment où cette question est posée avec insistance cumule une série de crises, comme nous en avons rarement conu dans l’histoire moderne : sanitaire (Covid-19), écologique (les effets négatifs ostensibles du réchauffement climatique) et géopolitique (la guerre en Ukraine). Prises individuellement, elles sont déjà de nature à entraîner de profonds changements économiques et politiques, combinées, elles peuvent conduire à des bifurcations sociétales radicales. L’Histoire nous enseigne que ces grandes bifurcations peuvent déboucher sur le meilleur comme le pire.

La décroissance est présentée par ses concepteurs comme l’une de ces grandes bifurcations qui doivent donner naissance à une nouvelle société. Pour Serge Latouche, l’un des théoriciens majeurs de cette mouvance, « le projet de la décroissance n’est ni celui d’une autre croissance, ni celui d’un autre développement (soutenable, social, solidaire, etc.), mais bien la construction d’une autre société, une société d’abondance frugale, une société post-croissance, ou de prospérité sans croissance ». Seul l’avènement de cette nouvelle société sauvera l’écosystème de notre planète et l’humanité, les autres voies n’étant pas des alternatives, mais des impasses.

Partant du principe qu’on ne doit croire que sur la base de données ou de preuves suffisantes, mon propos, fort modeste, consiste à apporter quelques éléments factuels qui peuvent nourrir le débat et, par là même, la réflexion des jeunes générations qui doivent former leur propre conviction sur la croissance durable ou la décroissance.